Bienvenue sur ce blog très intime.Ce blog a vu le jour peu après la naissance de mon fils Timothée.

Timothée est né, sans vie, le 25 mai 2007 à 37 semaines de grossesse.

Telle une porte ouverte sur mon âme meurtrie, vous y trouverez les mots que j'adresse à mon fils.

N'hésitez pas à laisser vos commentaires. Ils m'aideront à cheminer.


mercredi 27 juin 2007

Mon désir de toi

Encore cette maudite tristesse ce matin. Ca dégouline, ça m’envahit, ça m’assomme. Pour démarrer la journée on a vu mieux comme petit déjeuner !

Leitmotiv de ce début de journée : « Je ne comprends pas ». Je ne veux pas comprendre ! Je ne veux pas prendre avec moi (com-prendre) cette souffrance. Et pourtant je n’ai pas le choix. Personne ne peut le faire à ma place.

Tristesse ou frustration ?

Je déteste être frustrée. Il parait que la frustration naît d’un désir non assouvi. J’en étais bien consciente. Tellement consciente que j’en étais devenue frileuse : Ne surtout pas trop désirer ….Sinon….Attention ! « Madame Frustration » et son cortège de souffrances risquent de poindre le bout de leur nez.

Qu’est ce que je désirais au travers de toi mon amour ?

Interroger le manque généré par ton absence physique définitive m’aidera t il à répondre à cette question ? La réponse est dans la question, certains diront.

Début de réponse. En vrac : Concrétiser cet amour que je ressens pour ton père. Partager un projet commun avec lui. Etre une femme. Aimer d’un amour inconditionnel. Prendre soin. Apprendre. Découvrir. Etre fière. Etre responsable…Vivre ?

Tous ces désirs sont ils impossibles sans toi ? Non je ne le pense pas. Etait ce trop lourd pour toi de répondre à tous ces besoins, toutes ces attentes ? Peut-être…

As-tu choisi de partir si tôt pour m’aider à assumer mes désirs ?

As-tu choisi de partir si tôt pour m’aider à grandir ?

Ca fait mal de grandir.

vendredi 22 juin 2007

J'ai peur....

Maman est envahie par la peur ce matin.

Peur de sombrer dans la folie, la dépression, la douleur insurmontable.

Peur pour ma santé, celle de ton père.

Peur de ne plus pouvoir avoir d’enfant, de devoir faire ce deuil là aussi.

Peur de ne pas avoir la force, les ressources pour vivre avec cette blessure profonde.

Peur d’être enfermée à jamais dans la tristesse.

Peur de perdre ton père.

J’entends que certaines mamanges n’ont plus peur de la mort. Moi j’en ai terriblement peur. J’ai peur de mourir avec des regrets, ceux de ne pas avoir vécu, profité de ma vie.

Avec ton départ, je réalise comme la vie est belle et mérite d’être vécue pleinement. Que c’est à moi de saisir chaque petit moment de bonheur furtif et de les savourer, d’en prendre soin comme des joyaux.

Je ne sais pas si je peux te demander de m’aider.

C’était à moi de te rassurer, de te réconforter et me voilà, à te demander de le faire avec moi.

C’est le monde à l’envers.

J’ai eu une longue conversation hier soir avec une amie qui a perdu son petit garçon de la mort subite il y a trois ans d’ici. J’ai pu ressentir toute la douleur encore présente chez elle. Même si j’ai pu constater que l’on vivait différemment les choses, je la sentais encore tellement tourmentée.

Ca m’effraye beaucoup.

Est-ce que le pire m’attend ? Est-ce que cet élan de vie que je ressens n’est qu’une réaction de survie pour supporter le choc et qu’il va s’estomper au fil du temps ? La souffrance va-t-elle me rattraper, m’engluer ? Est-ce que je me voile la face ? Suis-je trop optimiste ? Dois je rester sur mes gardes ? Je ne sais qu’en penser.

J’en ai parlé brièvement avec ton père ce matin avant qu’il ne parte au travail. Il a tenté de me/se rassurer en me disant qu’on n’était pas les mêmes, que l’on avait pris un autre chemin. Ca ne m’a pas spécialement rassurée. Qu’en sait-on ? Que sait-on du chemin que l’on va prendre, des obstacles sur lesquels on va buter ?

Là aussi il me faut lâcher prise, me faire confiance.

Je doute, j’hésite.

J’ai peur.

mercredi 20 juin 2007

Petit bout de né....

Tu aurais dû naître aujourd’hui (selon le document du gynécologue).

Tu n’es plus dans mon ventre depuis presque un mois.

Voici des photos de ma grossesse. Elles datent du 10 mai 2007.

Longtemps j’ai insisté pour que ton père prenne ma bedaine en photo.

Pour le taquiner, je lui disais que s’il traînait trop, ce serait trop tard, j’aurais accouché.

Deux semaines plus tard, tu sortais le bout de ton nez hors de mon ventre.

Petit bout de nez tout froid est sorti.

Beaucoup m’ont dit que j’étais belle, enceinte.

Ils me percevaient épanouie.

Je l’étais.

Ce soir, j’emmène ton père au restaurant.

J’ai envie de passer une belle journée avec lui en ton honneur.

Les mots me manquent en ce jour.

Tu me manques.

Je t’aime.

dimanche 17 juin 2007

Il y aura un avant et un après Timothée

Déjà / seulement ( ?) le 17 juin…

J’ai perdu complètement la notion du temps. Il s’est comme arrêté la semaine du 21 mai.

Pendant ma grossesse, je décomptais les semaines avant ton arrivée. Plus que 8 semaines, 6, 3…Maintenant, le calcul est inversé. Une semaine, 2, 3, se sont écoulées depuis que tu nous as quitté physiquement.

Nous entamons cette semaine de juin qui devait être si belle, si douce.

Cette semaine où nous aurions annoncé ta naissance, où nous aurions répondu nonchalamment, machinalement, que le bébé et la maman se portaient bien.

Te portes tu bien ? Souvent je me le demande. Cette question risque de rester à jamais sans réponse. C’est abominable pour une maman de ne pas savoir comment se portent ses enfants. Tu étais si petit. Qui va te protéger ?

Pendant ma grossesse, j’ai souvent entendu que les enfants, ça changeait une vie, que plus rien ne serait pareil quand tu serais là parmi nous. Tu es là. Autrement. Notre vie ne sera effectivement plus la même. Nous avons eu le privilège de te rencontrer, nous avons fait un petit bout de chemin ensemble. Nous aurions tellement souhaité qu’il soit plus long. Mais tu as fait le choix de prendre une autre direction.

Quand on décide de concevoir un enfant, on accueille un petit être qui deviendra autonome, qui posera des choix de vie qui lui appartient. Tu as posé un choix. Celui de passer 8 mois dans mon ventre, pas un jour de plus. J’accepte ce choix. Il me fait souffrir car il n’est pas ce que j’avais imaginé. Il nécessite que je m’adapte.

Comme annoncé, il y a un avant et un après Timothée.

Je t’aime tellement.

Ta maman.

mardi 12 juin 2007

Cet immense vide...

Je me sens vide mon cœur, ce matin. Je suis envahie par ce vide immense, celui de ton absence. Faible aussi. Si faible, si fragile. En miettes.

Des paroles de chanson tournent en boucle dans ma tête depuis que tu es parti : une chanson italienne dont le refrain se limite à « Ti amo », deux lignes de Mylène Farmer : « Rien n’a de sens », « Tout est chaos ». Je n’aime pas ces chansons, mais ça tourne, tourne. Comme un disque rayé qui ne peut s’arrêter.

Il parait que ces airs, paroles lancinantes reflètent notre état d’esprit.

Tu me manques terriblement.

Cela faisait deux jours que j’avais l’impression d’aller un peu moins mal. Deux jours de répit. Deux jours pour reprendre un peu d’air. Aujourd’hui, rechute. Re plongeon en apnée dans les abysses de la tristesse, de la douleur et du non sens. Mes larmes coulent. Tout mon être crie cette douleur indescriptible. Rien ne peut soulager cette souffrance. Il ne me reste plus qu’à lâcher prise, la laisser me traverser, me transpercer, me vider encore un peu plus de mon énergie. Cette douleur m’épuise.

Un souvenir hante mes pensées. Il y a trois semaines exactement, le mardi précédant cette terrible visite chez le gynécologue, cette journée où je ne t’ai plus senti bouger. Un couple d’amis est passé chez nous avec leur petit garçon nous annoncer qu’il attendait un deuxième enfant. Nous avons débouché une bouteille de champagne pour fêter l’évènement. Je me souviens leur avoir dit que je ne te sentais plus bouger, que cela m’inquiétait un peu. J’ai agité gentiment mon ventre pour que tu te réveilles, pour que tu me donnes un petit coup de pied. En sachant ce que je sais à l’heure actuelle, ce souvenir me déchire le cœur. Cette insouciance avec laquelle j’ai secoué mon ventre alors que tu t’étais déjà endormi à jamais. Cette bouteille de champagne pour fêter une future naissance alors que tu n’étais plus vivant.

Ce jour là aussi, j’étais allée au magasin te choisir des jouets, faire ta liste de naissance. Des jouets en bois, des livres en carton, des cadres pour ta chambre. J’avais demandé qu’on les mette de côté pour être sûre que personne ne les prenne. Tout restera au magasin. Ce sera pour d’autres enfants, d’autres parents. Ca me semble tellement injuste. J’ai l’impression qu’on m’a volé mes rêves, mes projets…mon enfant. Il n’y a personne à qui réclamer justice, devant qui faire valoir ses droits. Je peux juste crier ma douleur à ceux qui veulent bien l’entendre. Je ne peux rien attendre de plus.

Donne moi, mon cœur, la force de supporter cette journée qui s’annonce difficile.

Ta maman qui n’a cesse de t’aimer.

lundi 11 juin 2007

Première journée, seule dans ce grand appartement

Première journée sans ton papa qui est retourné travailler. Je redoutais cette journée qui finalement s’est plus ou moins bien déroulée.

J’ai reçu de nombreux sms, appels téléphoniques, cartes de personnes qui nous aiment et nous soutiennent. Ca me réchauffe le cœur à chaque fois. Je leur en serai éternellement reconnaissante. J'ai regardé les photos de ta petite bouille, comme pour me donner un peu plus de force. Ta mamy (ma maman) m'a dit hier qu'elle les regardait souvent aussi.

On s'était tous réunis (ton papa et moi, mes parents, ton oncle et ta tante et ton cousin Mattéo ainsi que ton parrain, mon petit frère) pour la fête des pères. Ma maman n'a pas oublié de la souhaiter à ton père et lui a offert un livre (l prophète de Gibran). J'étais touchée par la spontanéité du geste. Elle n'a pas semblé hésiter l'ombre d'une seconde. Ce geste simple était un merveilleux cadeau, celui qui reconnait ton existence, notre nouveau statut de parents.

De nouveau, ton papa a pas mal joué avec ton cousin Mattéo. Maman me faisait remarquer que j'aurais eu deux enfants à la maison. C'est vrai que ton père est un peu "jouette". Il est si craquant avec les enfants. Je l'adore.

Je t’aime mon petit soleil.

dimanche 10 juin 2007

Lettre à mon fils (auteur : ton papa)

Voici le texte que ton papa a écrit pour toi.

Je me sens prête à le partager avec le monde entier.

Lettre à mon fils

Timothée,

Mon ange, mon amour, mon petit bonhomme,

Quand tu es né, je me suis retrouvé assourdi par ton silence. Mais tu étais là… De tout ton corps… Je n’avais que mes larmes pour te parler, et toi, tout ton silence pour m’écouter. Et tu le sais, je pleure encore…Surtout le soir, à l’heure où, sur la pointe de l’âme, je descends dans ce petit endroit de mon cœur, ce petit coin tout chaud, tout doux, où tu t’es installé, fort, bien vivant et disponible. Tu m’attends, tu me parles. Je te dis mon chagrin et les rêves que j’avais avec toi et ta maman. Toi, tu m’écoutes et, qui sait, peut-être qu’un jour, tu m’expliqueras ton départ et le sens que je dois lui donner ?

Tu es là. Différemment, mais tu es là. Maintenant, c’est par la lune que tu me regardes, c’est par le vent et les nuages que tu me parles, par le soleil que tu me souris, par les arbres que tu me donnes la force et par la terre que tu me portes. Tu es là tout autour de nous.

Je voulais encore te dire merci pour ta présence, certes trop brève, mais tellement intense, tellement vivante. Merci pour la si belle image de toi que tu nous as laissée. Merci d’avoir pu te prendre dans mes bras et te serrer contre moi. Merci pour tout ce que tu nous as donné et que, j’en suis sûr, tu nous donneras encore.

Merci, mon bel ange Ton papa et ta maman qui t’aiment.

La fête des pères

Aujourd’hui c’est la fête des pères…

J’ai terriblement envie de la souhaiter à ton papa.

J’hésite.

Ce mois de juin va être très difficile pour ton papa et moi. Beaucoup de dates symboliques : cette fête des pères aujourd’hui ; le 15 juin qui était pour moi la date à laquelle tu allais naître ; le 20 et 25 juin, les deux dates du terme. Je n’ai jamais compris pourquoi il y avait deux dates. Depuis les premières consultations, le gyné m’avait toujours annoncé le 25 juin comme la date du terme. Quand il a commencé à remplir la carte à remettre à la maternité lors de l’accouchement, il a inscrit le 20 juin. J’ai découvert ces deux dates différentes début mai et je n’ai jamais eu l’occasion de lui demander le pourquoi. Dans mon esprit j’avais l’impression que tu viendrais de toute façon plus tôt, vers le 15.

Une autre date est celle de l’anniversaire de ton papa, le 24 juin. Il ne voulait pas que tu naisses le 24, pour que tu ne lui « chipes » pas sa date d’anniversaire. Moi je lui répondais que tu serais le plus cadeau d’anniversaire que je ne pourrais jamais lui faire.

(…)

Tu es un magnifique cadeau d’anniversaire, mon cœur.

Maman

samedi 9 juin 2007

21,23,25...

Hier, papa et moi sommes allés chez notre conseillère conjugale qui a eu la gentillesse de nous recevoir en urgence. Nous en avions tous les deux besoin. Ton papa a pu parler de son petit bonhomme, toi ! Il a pris la décision de voir quelqu’un en individuel pour pouvoir être accompagné dans ce qu’il vit. Ton père parle peu de ce qu’il ressent mais quand il le fait, je le trouve tellement juste et authentique.

A l’heure où deux semaines auparavant, malgré la péridurale, je sentais des contractions du coté gauche, j’ai ressenti des petits lancements dans l’utérus. Les organes ont-ils une mémoire ? J’expliquais à ma psy que trois dates étaient gravées dans ma mémoire et dans mes tripes : le lundi 21 mai, date à laquelle je t’ai senti bouger pour la dernière fois dans mon ventre, le 23 mai, jour où on a découvert que ton cœur avait cessé de battre et le 25 mai, jour où tu as pointé ton bout de nez hors de mon ventre. La plus terrible des dates est la première, le 21. J’ai beaucoup de mal à y penser. Elle m’arrache le cœur. Ce jour là j’ai eu un pressentiment que quelque chose de louche se passait. Une sensation jamais ressentie jusque là. Comme un hoquet trop rapide. J’ai pensé aux convulsions mais j’ai tenté de me rassurer en écoutant cette petite voix qui me conseillait de ne pas me tracasser, de faire confiance. Maintenant, j’accepte l’idée que je n’aurais rien pu y faire. Tu m’as dit au revoir à ta façon.

J’ai reçu un appel téléphonique d’un ami qui venait aux nouvelles, voir si tout allait bien, si ma grossesse se passait bien, si je n’avais pas déjà accouché. J’ai dû l’informer de la terrible nouvelle. Il était choqué, n’avait cesse de me répéter que c’était horrible. J’ai mal au cœur et aux tripes quand je vois, j’entends la terreur que l’annonce de ton départ provoque chez chacun. Cela réveille chez moi cette immense douleur. Je me suis toutefois surprise à lui dire que malgré cette douleur, tu m’avais transformée, que je n’étais plus la même, que tu m’avais envoyé de nombreux messages d’amour, un élan de vie. J’en arrive à consoler les gens, à les rassurer. Je ne veux pas que tu sois synonyme d’effroi et de tristesse. Tu es source de si belles choses.

Parfois je me lève en pleurant, je laisse échapper ma colère, mon impuissance par des « pourquoi ? », par des « si… » étouffés dans l’oreiller. J’accepte difficilement ces moments, même si je sais qu’ils font partie du processus, du long chemin, j’ai chaque fois le sentiment de faire marche arrière. Ils me rappellent que la blessure est encore béante, qu’elle est bien loin d’être cicatrisée.

Je t’adore, mon bébé

Ta maman

jeudi 7 juin 2007

Prête à t'accueillir

Papa et moi sommes allés hier soir chez ton oncle et ta tante. Ton cousin Mattéo était en pleine forme. Il jouait beaucoup avec ton papa au ballon, ton papa lui chantait des chansons. C’était tout mignon mais j’avais le cœur serré en pensant qu’il ne pourrait jamais faire tout cela avec toi. J’ai parlé de toi, de ma grossesse avec ta tante Natalina, avec sérénité, douceur. Parfois je me laissais aller à un peu de cynisme, c’est une manière pour moi d’exprimer ma colère, ma culpabilité, ma tristesse. C’est un plaisir pour moi de parler de toi, il est important pour moi de le faire, de te rendre vivant aux yeux de chacun. Tu es bien loti dans mon cœur mais je voudrais que tu le sois dans celui des autres aussi. Mon petit ange, comme je t’aime…je suis débordante d’amour pour toi.

Quand tu es sorti de mon ventre, que j’ai pu te prendre dans mes bras, t’embrasser, tu m’as offert un merveilleux cadeau : la conviction que je voulais être mère. Au plus profond de mes entrailles, j’en suis certaine. Ce serait un honneur pour moi d’élever un enfant avec ton père. Un honneur, car donner la vie est un cadeau inestimable. Je le réalise seulement maintenant.

Je sais que c’est prématuré de penser à une prochaine grossesse. Partout j’entends, je lis qu’il ne faut pas refaire un enfant trop vite. Le corps de maman doit se remettre de la grossesse et de l’accouchement. Je me sens forte et extrêmement fragile tout à la fois. Je sens que je suis fatiguée, par la grossesse, l’accouchement et toutes ces émotions qui me traversent depuis ton tragique départ. Il faut laisser de la place au processus de deuil. Ne pas remplacer une grossesse et un bébé par d’autres. Dans ma tête et dans mon coeur, il me parait impossible de te remplacer. Tu es unique, les moments partagés avec toi dans mon ventre sont uniques.

Je me sentais prête à t’accueillir. Même si parfois ton départ prématuré me fait douter. Comme je suis à l’affût du sens, des messages que tu as voulu nous léguer. Il m’arrive de penser que tu nous invites à réfléchir, à nous pencher sur ce désir d’enfant, sur la place que tu prenais dans notre couple. Peut-être devons nous approfondir ces questions avant d’envisager de te donner un petit frère ou une petite sœur ?

Te porter dans mon ventre a été un moment merveilleux, aucun problème, pas de soucis de santé sauf la prise de poids qui contrariait le gynécologue de maman. Tu ne bougeais pas trop, juste assez pour rassurer maman, pour lui montrer que tu étais plein de vie dans mon bidou. Jamais je n’ai été réveillée au milieu de la nuit par tes mouvements. Tu laissais maman dormir. C’était la grossesse parfaite. Merci mon cœur pour ces magnifiques mois. Je peux affirmer que c’étaient les plus beaux instants de ma vie. Cette fusion, cette plénitude.

Je t’aime mon petit bouchon.

mercredi 6 juin 2007

Quand tu as quitté mon ventre...

Pas de colère ce matin, juste une énorme tristesse liée à ton absence. Quel vide ! Moi qui, enceinte, savourais les moments au calme avec ton papa sachant que ce serait les derniers. Maintenant, ces silences me glacent, je donnerais n’importe quoi pour t’entendre pleurer, me réveiller à n’importe quelle heure de la nuit pour te donner le sein, m’endormir à tes côtés, te regarder, te toucher.

Maman n’a jamais été habile avec les bébés, mais cela ne lui faisait pas peur. On aurait appris tous les deux. Il va me falloir apprendre à vivre sans toi physiquement.

Cela fait tout juste deux semaines que j’apprenais que ton petit cœur ne battait plus, que je prenais le chemin de l’hôpital pour accoucher de toi. Je ne pouvais pas continuer à te garder sans vie dans mon ventre. J’essayais d’être forte, de ne pas faire de crise d’hystérie. Même si mes entrailles hurlaient de désespoir. Jamais je n’ai imaginé que ça allait se passer comme cela. Moi qui m’en faisais pour le contenu des valises à prendre à l’hôpital, comment allait se passer l’accouchement, les contractions allaient elles être douloureuses ? J’étais persuadée que tu naîtrais pas césarienne.

Pendant deux jours, on m’a injecté un produit pour t’aider à sortir de mon ventre. J’ai eu des contractions mais non douloureuses. Tu es sorti de mon ventre en douceur, l’accouchement a duré 10 minutes, pas plus. J’étais si fière d’y être arrivée. J’ai espéré un miracle, que le médecin découvre que finalement tu étais vivant, que tu respirais. Il n’en était rien. Pas de miracle. L’infirmière t’a emmené pour t’habiller pendant que le médecin m’arrachait les tripes pour extraire les derniers morceaux de ta petite maison dans mon ventre ‘(mon placenta). C’était un peu douloureux. Pendant que le médecin terminait son boulot de gynécologue, l’infirmière a invité ton père à venir te voir. Tu étais un beau bébé selon elle. Coincée par la péridurale sur la table d’accouchement, j’ai entendu ton père éclater en sanglots. Le médecin ne savait plus où regarder. Je pense qu’il essayait de se concentrer sur son travail, malgré l’émotion. Ca m’a encore arraché un peu plus le cœur que d’entendre ton père pleurer ainsi. Moi je ne pouvais pas bouger. Je voulais réconforter ton père, te voir, te serrer dans mes bras. Ton père t’a pris délicatement dans ses bras. C’est vrai que tu étais si beau. Tout petit, tout fragile : 44 cm et 2kg130. J’avais si peur de te casser en te serrant contre moi. Tu avais encore du vernix sur le corps. On aurait dit que tu avais fait de la pâte à sel et que tu t’en étais tartiné tout le visage. Je n’oublierai jamais ce jour du 25 mai 2007.

Chaque fois que je te regarde sur les photos que nous avons prises de toi, je me sens apaisée. Je suis si heureuse d’avoir pu te voir, te toucher, te serrer dans mes bras, t’embrasser. J’aurais aimé te taquiner du regard. Tu es resté les yeux clos, endormi à jamais.

Nous sommes beaucoup soutenus par la famille, les amis. On est invité à venir manger, se changer les idées. Chacun souhaite nous soutenir sans trop savoir comment. Nous ne savons pas plus qu’eux. J’aimerais tellement pouvoir faire marche arrière ou au contraire accélérer le temps. Moins souffrir, moins pleurer. Personne ne pourra rien y faire.

Mon vœu le plus cher est de t’offrir un petit frère ou une petite sœur. C’est trop tôt. Je suis consciente qu’il y a d’abord un chemin à parcourir. Mon corps doit se rétablir. Mon esprit doit s’apaiser pour pouvoir accueillir à nouveau un petit être vivant.

Je t'aime mon coeur.

mardi 5 juin 2007

Quand la colère me gagne...

Mon cœur,

Maman ressent beaucoup de colère aujourd’hui. Contre elle et contre le destin. Parfois je suis en colère contre toi. S’il m’arrive de traiter de corniaud, ne t’en fais pas, cela va passer. Je pensais ne pas ressentir cette émotion mais elle est là, bien présente. J’oscille entre la profonde tristesse, presque le désespoir et la colère, le sentiment d’injustice.

Une collègue de ton papa nous a écrit un petit mot dans lequel elle nous remercie. Tu nous rappelles à tous d’être bien vivants, humblement. Ca me touche mais ne soulage pas ma tristesse.

lundi 4 juin 2007

Timothée, mon guide...

Maman s’est réveillée triste ce matin. Elle n’avait qu’une seule phrase d’enfant gâtée en tête : « Rendez moi mon bébé ! ». Laissez moi vivre ces instants tant espérés.

Hier nous sommes allés, ton papa et moi, chez les parents de ma filleule, Maëlle, adorable petite fille de 3 ans pleine d’énergie. Ton papa a joué avec elle, lui a chanté des chansons. Il est adorable avec les enfants. J’aurais été si fière de lui offrir un enfant. Tu es venu mais il ne pourra jouer avec toi. J’ai dû batailler pour ne pas pleurer. Dès notre retour, j’ai craqué. Ton père m’a avoué ne pas vouloir pleurer. Je suis un peu inquiète pour lui mais j’essaye d’en prendre soin, de le cajoler, lui laisser des moments d’intimité.

On a parlé de toi, de ton départ tragique. J’expliquais à ton père que j’avais l’impression de vivre une croisière magnifique quand j’étais enceinte et qu’un tsunami s’est abattu sur nous à quelques lieux de l’île paradisiaque sur laquelle on devait arriver. En l’ombre de quelques minutes, j’ai eu l’impression de me retrouver sur un radeau, de penser à notre survie et d’accoster sur une île inconnue qui n’avait rien de paradisiaque. Sur cette île, il y a une montagne que l’on peut apercevoir au loin. Je sais qu’il me faut la gravir, que cela va être long et laborieux. Je la vois au loin et je n’ai que mes jambes pour marcher. Les chemins qui y mènent ne sont que tristesse et désolation. Je souhaiterais tellement pouvoir y accéder très vite, par transportation, par hélicoptère… je n’ai malheureusement que mes jambes. Je peux juste accélérer le pas, ne pas me perdre, ne pas m’engager trop vite dans ce que je pense être des raccourcis, au risque de devoir faire demi tour. Dans cet environnement hostile, il est vrai que j’apprécie chaque petite fleur, chaque rayon de soleil.

En parlant de petite fleur, j’avais abandonné, il y a quelques semaines, un bananier à l’extérieur. Je le pensais mort. Je comptais récupérer la terre pour planter autre chose. J’ai découvert hier que le bananier avait repris et Oh surprise ! Il m’offrait même un bébé bananier. Encore merci mon ange de ce magnifique cadeau ! J’aime penser que j’ai réussi, pendant ces 8 mois, à te transmettre mon modeste intérêt pour les plantes, les fleurs. Que c’est une des voies que tu as choisi pour me donner du courage, me rappeler que la vie continue, qu’elle est belle et mérite qu’elle soit vécue pleinement.

Sois mon guide, petit bouchon.

dimanche 3 juin 2007

Timothée, ma force...

Mon ange,

Je me suis réveillée ce matin, sans crise de larmes, avec ton papa à mes côtés. Je réalise à quel point je l’aime. Je pense que c’est l’amour que j’ai pour toi qui me transporte, m’ouvre les yeux. Comme j’ai pu m’arrêter sur des futilités, passer à côté de si belles choses ! Merci mon cœur de me faire réaliser tout cela. Je n’aurai pas assez d’une vie pour te remercier.

Je sens le changement en moi, même si cela me fait souffrir atrocement, j’essaye de l’accueillir sereinement. Comme si, chenille, je devais me faire violence pour devenir papillon. Quitter cette enveloppe, ce carcan qui m’a si longtemps emprisonnée. Tu es ma force, mon envie de vivre. Ton grand père (le nouveau compagnon de ta grand-mère paternelle) nous disait que tu dégageais quelque chose de fort. Quand je regarde les photos de toi. Je trouve qu’il n’a pas tort. Ton départ prématuré va nous transmettre encore plus cette force. J’en suis sûre.

Ton grand père paternel et sa compagne nous ont envoyé un petit mot, je voulais le partager avec toi : Certains enfants ont le pouvoir de dire par leur présence fugitive et furtive, puis par leur disparition brutale « ose ta vie, toi seul(e) la vivras ». Nous pouvons ainsi écouter et entendre le message secret envoyé par ces enfants dont la présence si éphémère nous blesse à jamais si nous restons sourds à leur message d’espoir.

Maman te promet d’être attentive aux messages qui tu vas lui envoyer.

Reçois tout mon amour.

Maman

samedi 2 juin 2007

De retour...

Nous revoilà des étangs de La Julienne et non Sainte Julienne. Maman transforme toujours tous les mots comme tu as certainement déjà pu le remarquer. Cela m’a fait du bien de me retrouver dans la nature. Nous avons marché sans se parler, ton père et moi. Il y avait pas mal d’enfants dans la plaine. J’ai pensé énormément à toi. Comment tu aurais grandi, aurais tu été blond comme ton papa ? Tu avais les cheveux relativement foncés en sortant de mon ventre.

Ton papa m’a dit qu’il était plus attentif au vent. Selon lui, c’est comme cela que tu nous parles dorénavant. Il me plait de penser la même chose. Je me laisse bercer par chaque petite bourrasque présente. Je les écoute attentivement. J’essaye de voir le positif dans chaque instant. Je sens que c’est une partie de ton message d’amour.

Ta maman qui t’aime.

Timothée, mon messager d'amour

Aller faire un tour autour des étangs de Sainte Julienne. Les heures me paraissent interminables. Je n’arrive pas à faire autre chose que de penser à toi. On voulait aller te voir au cimetière. Papa n’en a pas la force. Maman hésite aussi. Ne nous en veux pas. Il faut que papa et maman se sentent prêts. Nous avons des manières différentes de vivre notre tristesse. Ton père est très triste mais il n’en parle pas trop. Moi j’arrive parfois à passer une heure sans pleurer. Je dois beaucoup travailler sur moi-même (comme diraient les québécois). Parfois nous sommes en colère contre toi. Là encore excuse nous. Ton départ nous bouleverse, il nous faudra du temps pour vivre avec nos blessures.

Dans ces minutes de sérénité qu’il m’arrive de vivre, je me surprends à te dire merci pour ces moments magnifiques que nous avons vécus ensemble, quand tu étais dans mon ventre. Cela m’a permis de découvrir un état de plénitude ignoré par moi jusqu’à présent. Tu m’as fait prendre déjà conscience de pas mal de choses. Que j’aimais plus que tout ton père, que je remerciais le ciel, le destin de l’avoir mis sur ma route. Ton départ ne fait que démultiplier tout cet amour que j’ai pour lui.

Mille fois merci mon bel ange, mon messager d’amour.

Ce matin, je t’ai supplié de nous envoyer un signe. Vers midi, maman a découvert une jolie fleur blanche (d’une plante dont je pensais qu’elle n’avait pas survécu à l’hiver). J’avais demandé à ton père ce matin si on pouvait imaginer que tu te manifestes au travers des fleurs, de leur parfum, il m’a répondu que oui.

Merci mon ange. Je t’aime.

Continuer à vivre malgré ton absence

Maman s’était endormie dans le fauteuil, Papa vient seulement d’aller se coucher, il dort du sommeil du juste. Maman pleure. Elle a besoin de pleurer. Elle ne supporte plus les insomnies, sans toi à ses côtés.

Encore tout à l’heure, pour aller faire les courses. Quelle épreuve ! Maman a du retenir ses larmes. Faire les courses était presque devenu un plaisir quand tu étais dans mon ventre.

Qu’est ce que tu me manques mon boutchou !!!! J’ai mal. C’est indescriptible. Pourquoi m’arracher le cœur ainsi ?

Ton papa essaye de me soutenir comme il peut. Il sculpte.

Il vient de refaire en miniature Sedayan, son premier perso de jeu de rôle. Tu as presque l'identique avec toi.

C'est un peu lui...parait-il.